Danse avec les ombres
citation ou sous titresJe suis née à Londres en Angleterre, mes parents n'ont pas jugés bon de me connaître puisqu'ils m'ont abandonné dans un panier d'osier à la porte d'un couvent. Il aurait normalement été de coutumes que les sœurs m'emmènent et me livrent au premier orphelinat du coin, mais comme beaucoup de choses dans ma vie, les choses ne suivirent pas la voie de la normalité. Les sœurs du couvent me gardèrent auprès d'elles, m'élevant et m'éduquant comme leur fille, l'une des leurs. Peut être est-ce le déclin de la vie ecclésiastique qui les poussa à me garder, voyant en moi une recrue offerte toute entière par Dieu lui même ? Seul ce dernier à la réponse et cela importe peu. J'ai donc grandit au sein du couvent, devenant une fervente servante du Seigneur, bénéficiant d'une éducation complète, sévère mais juste. N'ayant pas de camarade de mon âge, entourée de femmes plus âgées, je grandis assez vite, la maturité n'attendit pas chez moi le nombres des années.
Quelques bêtises et sottises par-ci et par là, mais sans grandes conséquences, j'étais une enfant plutôt disciplinée et tranquille. Mais tout bascula lors de mon adolescence, de mauvais rêves, des tremblements, engourdissements et violentes migraines me prenaient soudainement juste avant que ne survienne un décès. Une malédiction, personne ne savait si je sentais la mort venir ou si j'en étais la cause... Mes sœurs m'évitèrent, je les terrorisais. Je me retrouvais coupée du monde et des miennes, seul me restait Dieu dans ma grand solitude. Du moins c'est ce que je pensais avant qu'il ne vienne hanter mes nuits, l'autre, le fils de la perdition et du mensonge, le prince des ténèbres et des fornicateurs, le démon. Il me harcela dans mes songes, tentant de me convaincre que je fusse sa promise, son enfant, une sorcière. Aucun prêtre ne pu m'exorciser, les prédications funèbres et les cauchemars continuèrent tant et si bien que la mère supérieur décida de m'hospitaliser, ne sachant que faire de moi.
Dans cette époque moderne, le folklore des sorcières, démons et autres croyances ésotériques sont de l'ordre de la folie et de la maladie mentale. On m'enferma dans une chambre, on me fit suivre par un psychiatre, on m'assomma de tranquillisants et de médicaments sensés me guérir de mes délires et de ma névrose. Perdue et prise entre la science et les ténèbres, je perdais peu à peu ma lumière et ma dévotion envers le Tout Puissant. Fatiguée et lasse de ma lutte, je céda une nuit aux avances du démon, promettant de me faire sortir de cette prison médicalisée si je m'offrait à lui. Sous les traits d'un aide soignant, il vont me voir cette nuit réitérant sa proposition et je ne puis plus lui tenir tête, trop brisée. C'est alors qu'il me prise, je m'unis charnellement à lui et j'obtins ma liberté. Plongée dans un monde que je ne connaissais pas. Il me fallait cependant fuir Londres devenu trop dangereux pour moi.
Je m'exilais dans un petit village dans les Landes de Cornouailles. Humiliée et rongée par la culpabilité d'avoir cédé au démon, je tâchais de me racheter en offrant mes services à l'église du village. Ménage, cuisine, chants, préparation, prières, offices.. la vie religieuse ordonnait ma vie comme elle l'avait toujours faite. Mais les cauchemars s'intensifiaient, mes dons sombres et obscures devenaient plus forts, même le prêtre se trouvait démuni face à mon tourment. Alors il me conseilla l'impensable, aller voir Marlène la Terrible, une femme habitant la Lande, une sorcière disait-on. Je me rendis chez elle alors que j'entrais tout juste dans la deuxième décennie de mon existence. Elle sut tout de suite qui j'étais et pourquoi je venais. Elle m'accueillit chez elle et j'y retrouvais cette sévérité juste et cette dureté crue que j'avais connu au couvent. Elle m'enseigna alors l'art occulte de la sorcellerie, mais non pas celle qui appel le Diable mais celle qui le chasse et s'en protège, une magie blanche et naturelle.
Durant une quinzaine d'années, j'appris les dons divinatoires, les potions et filtres, les amulettes et sortilèges, les rituels et les sabbats, devenant celle que je devais être. Ce que je pensais être une hérésie s'avéra être mon salut et le démon n'eut d'autre choix que de me laisser en paix. Marlène qui était déjà âgée à mon arrivée mourra de sa belle mort comme on dit. Mais avant de rendre son dernier soupir et de rejoindre les armées célestes comme elle aimait le prétendre, elle me légua son bien le plus précieux, son grimoire, rassemblant toutes ses connaissance ainsi que les sorts qu'elle même avait refusé de m'apprendre. Sa mort ne fut pas une surprise puisque grâce à mon don je l'avais senti venir. En revanche, ce que je n'avais pas prévu, c'est que quelques semaines plus tard, les cartes et oracles de divination me sommèrent de me rendre sur une petite île, celle de Skye, visiblement mon destin se tournait vers cette endroit. Avec les maigres ressources dont je disposait, je parvint tout de même à m'y rendre.
Sur place, je me dégotais un boulot d'antiquaire et parvins ainsi à subvenir à mes besoins et à trouver un petit logement. Je viens tout juste d'arriver mais cette terre semble déjà s'imprégner en moi, il n'y a aucun doute que les ravages qui frappent cette contrée ne sont guère les desseins de Dieu mais bien l’œuvre d'une force bien plus maléfique que je m'efforcerais de chasser et de combattre et qui sait, retrouver peut être le pardon et la miséricorde du Seigneur et le salut de mon âme.